III. I – INTRODUCTION.

L’objectif de ce chapitre n’est pas de réécrire la préhistoire de toute la région. Il existe moult ouvrages qui le font très bien. Mon but est seulement de rechercher et de décrire ce qui pourrait être spécifique au village. Déjà, la tâche n’est pas simple car après quelques recherches bibliographiques, j’ai trouvé dans Le Dictionnaire des Sites Préhistoriques du Gard la mention suivante concernant le village : « Saint André d’Olérargues : Aucune découverte archéologique n’est signalée dans la bibliographie pour la période considérée. »
Ce n’est pas très encourageant, mais on peut malgré tout rechercher et observer sur place et pourquoi ne pas faire quelques supputations.

III.II – GENERALITES SUR LA PREHISTOIRE.

Comme pour la géologie, il nous faut expliquer et clarifier avant toute chose, pour savoir de quoi l’on parle. La période considérée est divisée en quatre sous-périodes le Paléolithique, le Mésolithique, le Néolithique, le Chalcolithique et enfin la période historique qui a vu l’installation des Ibères, des Volques, des Celtes, des Gaulois, des Grecs et des Romains.

Le Paléolithique. Ce terme vient du grec παλαιός / palaios (ancien) et Λίθος / lithos (pierre). Il peut donc se traduire littéralement par « ancien âge de la pierre ».
L’âge « ancien de la pierre » identifie les premières cultures à employer la pierre pour faire des outils. Ce sont souvent des éclats assez grossiers de silex (roche siliceuse très dure qui était employée pour faire les outils dits « de pierre ») mais qui donne des lames assez tranchantes pour découper le gros gibier alors abondant). Cette période couvre plus de 2 millions d’années et s’étend jusqu’à la fin de la dernière période glaciaire (~10.000 ans).
Il y a des nombreux sites aux alentours : Allègre, la Bastide d’Engras, Belvézet, Castillon, Collias, Fontarèches, Saint-Anastasie, Serviers et Saint-Quentin. Il est très probable qu’il y ait eu des hommes et des femmes du Paléolithique à St André d’Olérargues, mais les traces de leur présence restent à confirmer. Le Paléolithique a duré très longtemps, mais le nombre des humains était alors beaucoup plus faible que pendant les périodes plus récentes et ces chasseurs souvent non sédentaires ne laissaient pas beaucoup de traces.

Le Mésolithique. Ce terme vient du grec μεσος / mesos , «moyen» et Λίθος / lithos, «pierre», littéralement «âge moyen de la pierre»
C’est la période de transition entre la culture traditionnelle de chasse du Paléolithique et celle de l’agriculture du Néolithique. En Europe, cette période est assez courte, de ~11.000 ans à 7.000 ans.

Le Néolithique. Ce terme vient du grec νέος / néos, nouveau, et λίθος / líthos, pierre. Il désigne littéralement le « nouvel âge de la pierre ».
C’est la période de l’agriculture, la formation de villages fixes, et de la céramique. Chez nous, elle débute il a y environ 7.000 ans. Pendant le Néolithique et les périodes suivantes, les plateaux du Gard sont parmi les lieux les plus importants en Europe pour les peuples préhistoriques avec une densité de peuplement très forte.

Le Chalcolithique. Le nom a été forgé par les préhistoriens à partir des racines grecques khalkos cuivre et lithos pierre. Ainsi, le Chalcolithique est la « période où un outillage principalement en pierre peut être complété par des objets en cuivre travaillé ».
La période du cuivre est assez courte chez nous, de 5.000 à 4.500 ans. C’est alors que beaucoup des mégalithes (« grosses pierres ») sont érigés. Date probable du menhir de Belvézet ou de celui de Malataverne près de Lussan. C’est la période des pasteurs des plateaux. Il est important de comprendre qu’avec la découverte de nouvelles matières pour les outils, les anciennes matières ne sont pas abandonnées. Le silex continue à être employé pendant très longtemps.

III.III – SUPPUTATIONS ET REALITES PREHISTORIQUES.

Je précise bien que, dans ce paragraphe, je fais des supputations suite à des observations que j’ai faites sur le terrain. Je n’ai aucune preuve de ce que j’avance si ce n’est l’existence des choses observées.

Dolmens, menhirs.

Il y a, au lieudit les Combes, une « table de pierre » en bordure d’une vieille vigne

Figure 61. Photo de l’auteur.

Cette pierre qui fait près de trois mètre de long, taillée comme une lame dans le Gault est me semble-t-il « une pierre plantée » qui a dû tomber avec le temps et que personne n’a jamais redressée. Un des propriétaires successifs de ce terrain l’a un jour fait déposer sur quatre pieds en pierre pour en faire une table. Il semble qu’une de ces extrémités soit tronquée, comme cassée, d’autant que l’extrémité cassée semble faire partie des morceaux qui lui servent aujourd’hui de socle. C’est cette cassure, sans doute, qui a dû transformer son état de menhir en état de petit dolmen.

Je pense que cette pierre devait être plus fière lorsqu’elle était dressée vers le ciel. Il en va ainsi des choses comme des humains les plus fiers retombent un jour …

Enceintes

Là encore, je suis dans le domaine des supputations. Mais j’encourage le lecteur à aller se promener dans les bois sur les hauteurs du plateau entre le bourg de St André d’Olérargues et le ruisseau de Cuègne vers le lieudit « grange de Bayle » pour se faire une opinion. Il y a là, des murs d’une largeur de 1.5 à 2 mètres, de plus de 1.5 m de haut du coté plateau et d’environ 2.5 m du coté de la pente, sur plusieurs centaines de mètres de long.

Figure 62. Photo de l’auteur
Figure 63. Photo de l’auteur.

Ils sont parfaitement rectilignes et très bien construits, bien mieux que les murets bordant habituellement les champs. Ces murs bordent le plateau et sont ponctués de ruines beaucoup plus écroulées et abandonnées que par exemple la grange de Bayle qui semble nettement plus récente. On peut se demander quel est l’intérêt de telles constructions. Si c’est un stockage de pierres récoltées dans les parcelles proches, ça serait incontestablement les parcelles les plus caillouteuses de la région et les mieux rangées !
Quand on s’imagine que le poids d’un tel ouvrage est d’environ une tonne au mètre linéaire, cela représente trois à quatre cents tonnes déplacées et entassées à main d’homme. Je trouve que pour parquer quelques chèvres ou quelques moutons, l’ouvrage est démesuré.

Tumulus

Y a-t-il (et combien?) des tumuli (un tumulus, des tumuli) à St André d’Olérargues. Les tumuli étaient plus faciles à déceler avant-guerre quand la végétation dans la garrigue était moins dense par suite du pâturage, de la coupe de bois plus intensive, des feux fréquents et de la culture plus régulière de toutes les parcelles. J’en ai identifié quelques-uns, mais sont-ce véritablement des tumuli ou simplement des tas de pierres tirées des champs et entassées ? Seules des fouilles pourraient le dire.

Figure 64. Photo de l’auteur.

Ainsi au même endroit que les murs précédemment cités, il y a ce tumulus de pierres entassées (figure 64), en plein milieu d’une parcelle dans le bois, entourée des murs décrits. Si ces pierres ont été retirées d’un champ de culture, il est curieux qu’elles aient été entassées au milieu de ce qui a pu être un champ plutôt qu’être mises sur le côté, comme cela se fait habituellement.

J’en ai vu un autre, coté St Marcel de Careiret, non loin de la route du Mas Christol. C’est un tas de pierres pas très grosses et à peu près de mêmes tailles. Des pierres de cette dimension il y en a plein les vignes, donc ce ne sont pas des cailloux retirés d’un champ. Leur granulométrie est assez homogène et correspond à un remblai qui a peut être transporté, par exemple, sur l’épaule dans de grandes mannes en osier pour recouvrir un tombeau

Figure 65. Photo de l’auteur.

Abri sous roche

Qu’est-ce qu’un abri sous roche ?

Ce n’est pas une grotte, seulement une falaise qui c’est délitée et érodée plus vite que les autres et se creuse à sa base, puis quand le creux devient trop profond, s’écroule pour se recreuser plus tard et ainsi de suite.

Franck Boudier dans son ouvrage « Préhistoire de France » édité chez Flammarion en 1967 explique ainsi la formation d’un abri sous roche :

1. Pendant une première période glaciaire, la gélivation commence à le creuser.

2. Il devient habitable.

3. A la période interglaciaire suivante, les activités chimiques dissolvantes de l’eau et de la végétation érodent son toit et laissent un sol résiduel d’altération.

4. et 5. Pendant une deuxième période froide, s’achève la destruction du toit et en s’écroulant il enfouit les restes et traces de l’occupation du lieu.

6. La période interglaciaire suivante amène la formation d’un sol d’altération sur l’emplacement de l’abri effondré.

Figure 66. Photo de l’auteur. Extrait de l’ouvrage de Franck Boudier cité ci-dessus.

Il existe sur la commune un lieu qui répond parfaitement à cette description. Il se trouve dans le vallon du Réfrégeoun sous le village, et comme souvent un imbécile s’est cru obligé d’y graver son nom !

Figure 67. Photo de l’auteur.

On sait que les chasseurs-cueilleurs de cette époque utilisaient plus facilement pour se déplacer le lit des cours d’eau. Ceux-ci permettaient non seulement une plus grande facilité de déplacement qu’en forêt dense, mais avaient aussi l’avantage d’être à la fois un lieu partagé par le gibier qui venait y boire et un réservoir naturel d’eau douce pour les humains.

Il est vraisemblable que des familles ou des clans qui remontant de la vallée de la Cèze ou de celle de l’Aiguillon où de nombreuses grottes et abris sous roches attestent d’une présence humaine, ont emprunté ce vallon.

De même les vallées de l’Avègue et du ruisseau de Cuègne ont dû être un lieu de passage entre la vallée de la Cèze et les plateaux supérieurs jusqu’à la plaine de St Quentin la Poterie.

Outils de silex

Les plateaux Pauletien et Turonien sans avoir de grand gisement sont riches en silex c’est une raison supplémentaire pour accréditer la thèse d’une présence humaine sur notre territoire dès la préhistoire.

On trouve par endroit, sinon des outils abondants, du moins de nombreux éclats caractéristiques d’une taille de silex et avec un peu de chance on peut mettre la main sur des pointes de flèches ou des racloirs, grattoirs, burins, bifaces comme ceux-ci que j’ai trouvées le long du gisement de silex qui serpente entre l’étage Pauletien et l’étage Turonnien (Voir le chapitre IV).

Ce site qui s’étend sur près d’un km n’était sans doute pas un habitat, malgré la présence de la source, mais un lieu de collecte et de taille de silex. C’est une des raisons pour laquelle on ne trouve pas de très beaux spécimens sur place. Les plus belles pièces ont été emportées. Celles qui restent sont soit des outils qui ont été remplacés, soit des outils plus ou moins bien réussis et abandonnés. Tous les humains de l’époque n’étaient pas forcement des virtuoses de la taille.

Figure 68. Photo de l’auteur.

Figure 68-1. Photo de l’auteur. Biface grossier

 

Figure 68-2. Photo de l’auteur.

Figure 68-3. Photo de l’auteur.

Figure 68-4. Photo de l’auteur. Perçoirs, burins et grattoirs

Figure 68-5. Photo de l’auteur. Hache vue de coté

Figure 68-6. Photo de l’auteur. Hache vue de dessus.

Figure 68-7. Photo de l’auteur. Hache vue de face.

Figure 68-8. Photo de l’auteur. Nulcléus.

Figure 68-9-10-11. Photo de l’auteur. Diverses pointes de flèches.

Figure 68-12-13. Photo de l’auteur. Pointes de flèches.
Figure 68-14. Photo de l’auteur. Percuteur sphérique.

Figure 68-15. Photo de l’auteur. Percuteur.

Figure 68-16. Photo de l’auteur. Polissoir.

III. IV – REVUE DE QUELQUES PIECES ARCHEOLOGIQUES DE LA REGION PROCHE, DATANT DES PREMIERS SIECLES APRES J.C.

SAINT ANDRE D’OLERARGUES

Dans la revue Rhodanie N°37, p. 35-39. P. Clément et A. Peyre en 1991 : dans un article intitulé : De la Via Domilia aux routes de l’an 2000, Rd. Presses du Languedoc, signalent une tête de cheval d’origine celtique en terre cuite trouvée à Saint André d’Olérargues.

St André d’Olérargues, un village Gallo-Romain !

Voici la preuve de l’origine romaine du village comme nous l’avons vu au chapitre I concernant l’étymologie du nom du village. C’est la preuve par « tegula et imbrex » !
Voici quelques explications préliminaires. La tuile gallo-romaine se présentait ainsi (photos internet Wikipedia):

Puis au 2ème et 3ème siècle av. JC, les Romains conquièrent la région. Au 4ème siècle les Wisigoths prennent possession à leur tour de la contrée. A partir du 5ème siècle, Francs et Wisigoths se disputent le Sud, alors que les Huns venus du cœur de l’Asie repoussent les autres peuples au nord. Puis c’est le tour des Francs qui se présentent tels des barbares païens et violents alors que les Wisigoths sont des chrétiens ariens. Les Wisigoths ont gardé les structures Romaines en place, se servant de la monnaie, de l’écriture, de l’architecture et d’autres acquis romains. A partir de 7ème siècle jusqu’au 10ème, ce sont les incursions musulmanes. Les Sarrasins remontent d’Espagne et envahissent le pays

Au début du XX° Siècle l’orthographe du nom est identique à celle d’aujourd’hui. Nous le voyons par exemple dans un procès-verbal d’une séance du Conseil de Fabrique(1) datant de 1906.

Figure 69. Copie de l’auteur.
Les tuiles inférieures s’appellent : tegulae (tegula au singulier et les tuiles couvre joints imbrice ou imbricis (imbrex au singulier).
Le nom latin tegula est à l’origine des mots tuile, toit, toiture etc. Le nom imbrex a donné notamment le verbe imbriquer, les tuile étant imbriquées les unes dans les autres.
Lorsqu’un bâtiment est soumis à l’usure du temps, aux guerres, au manque d’entretien ou à la destruction volontaire pour récupérer les pierres pour faire d’autres constructions, les tuiles sont les composants les plus fragiles et sont presque toujours restées sur l’emplacement sous forme de fragments, lors de l’effondrement des charpentes. La découverte de ces fragments est la preuve incontestable de la présence d’un bâtiment et le type de tuiles donne une indication sur la date de la construction.

Nous voyons sur le tableau ci-après que les premières tuiles canal apparaissent en Chine et Mésopotamie dès 4000 ans av. JC. La tegula et l’imbrex romaine sont utilisés dès 2000 ans av. JC et jusque vers 400 après JC dans tout l’empire romain. Avant les romains, les celtes et les gaulois utilisaient le chaume et les joncs, voire le bois pour confectionner les couvertures de toitures.

Figure 3. Numérisation de l’auteur. Archives paroissiales de St André d’Olérargues:
  • Dans le testament du prieur de St André, Dominique Camerle en 1699, nous trouvons à l’avant dernière ligne de cet extrait : « St andré Dolleylargues ».
Figure 70.

J’ai trouvé de nombreux fragments de ces tuiles sur plusieurs sites. Il y avait ainsi, incontestablement, des villas gallo-romaines sur la commune. Faute de retrouver les emplacements des murs ou des fondations qui sont enfouies, on peut trouver ces fragments de tuiles sur le sol en surface.

Je citerai ainsi quelques emplacements.

– Site N°1. Sur le sommet de la crête au-dessus des Fabrèges dans et en bordure de la vigne de la famille Morin au niveau de la ligne électrique auprès du bois de pins et de pins pignons, en voici la photo de quelques fragments.

Figure 71. Photo de l’auteur.
Figure 71-1. Photo de l’auteur. Fragment de vases.

– Site N°2. J’en ai trouvé sur la même crête plus à l’ouest à la limite avec la commune de St Marcel de Careiret, au sommet de la vigne de la famille Mazon non loin du chemin qui mène au château des Opiats.

Voici quelques exemplaires, c’est exactement le même type de tuiles. On voit bien sur les fragments en bas à gauche la forme de l’extrémité de la tuile qui venait recouvrir celle qui était la suivante en dessous.

Figure 72. Photo de l’auteur.
Figure 73. Photo de l’auteur.
– Site N°3. Encore sur la même crête, mais cette fois vers l’est, en bordure de la route de Christol, coté St Marcel, au sommet des Rouvières et au niveau de la croix et du carrefour allant au Sarsol, dans la vigne il y a une légère butte aplatie ou l’on peut trouver de nombreux fragment de tegulae. J’y ai trouvé mêlé des morceaux de fond de vase et de poteries en terre cuite. (sur la photo 75).
Celles-ci sont un peu plus striées et de couleur plus « crème ». Comme si l’argile ou la cuisson étaient différentes, plus vieilles ou plus récentes ?

Figure 74. Photo de l’auteur. Fragments de tegulae

Figure 75. Photo de l’auteur. « puzzle » de poteries

Figure 75-1. Photo de l’auteur. Fragments de vases
Figure 75-2. Photo de l’auteur. Fragments de vases
Figure 75.3 Photo de l’auteur. Fonds et bord de vases
Figure 75-4. Photo de l’auteur. Détails décorations
– Site N°4. Un autre site se trouve à l’entrée du village, à l’extrémité de la vigne à l’ouest de la route D23, au-dessus des nouvelles constructions. C’est toujours d’une même facture, en plus quelques fragments de poteries.
Figure 76. Photo de l’auteur.
– Site N°5. Aux Fabrègues, ou plus précisément au lieudit La Cabane, dans la vigne de Jean-Yves Couderc, face à la maison de Catherine et Alain Couderc il y a un important gisement des mêmes pièces. L’habitat était proche à vol d’oiseau du site N°1 et situé entre les deux sources qui alimentent les deux bras du ruisseau Réfrégeoun. Voici quelques pièces.
Figure 77. Photo de l’auteur.
– Site N°6. Au lieudit l’Abeillaud ou l’Abeilland au-delà du mas Vaquier. Là, la terre est grasse est les pierres comme les fragments de tuiles ont tendance à s’enterrer et sont donc plus difficiles à trouver.
Figure 78. Photo de l’auteur.
– Site N°7. Au lieudit Rieutort à la limite entre St André d’Olérargues et St Marcel de Careiret sur la crête sableuse de l’étage Turonien, on trouve de beaux fragments. Ainsi sur la photo ci-après le morceau à gauche mesure plus de 25 cm de long.
Figure 79. Photo de l’auteur.
– Site N°8. Au lieu-dit Grand Combarot dans le haut des vignes au niveau du croisement des chemins de randonnée venant d’une part des « Vignasses » et d’autre part de « sous les Opiats ».
Figure 80. Photo de l’auteur.

On peut trouver sur ce même site des fragments de dolium qui sont de grandes jarres, servant à stocker l’huile ou le vin. Les photos ci-après représentent le col de l’embouchure du récipient, c’est la partie la plus épaisse, donc la plus résistante. Ces jarres assez hautes étaient souvent partiellement ou complètement enterrées pour avoir un accès à l’ouverture à hauteur d’homme, afin d’y puiser aisément le liquide contenu.

Figure 80-1 et 80-2. Photo de l’auteur.
Figure 80-3. Ensemble du « puzzle ».
Figure 80-4. Photo de l’auteur. Détails des décorations.
Figure 80-5. Photo de l’auteur. Autre petit « puzzle »
– Site N°9. Après la Cadinière en descendant en direction de Regarde-Venir, au sommet de la crête à droite de la route et à la limite de la frontière avec Verfeuil vers l’altitude 207 m, de nombreux fragments se trouvent tout le long d’un muret. Ces fragments semblent être, de par leur aspect et leur structure les plus anciens parmi tous ceux que j’ai trouvés.
Figure 81. Photo de l’auteur.
– Site N°10. Au-dessus du bois de Cuègne et à la limite de la frontière avec Verfeuil dans le prolongement de la crête vers l’altitude 247 m, plus haut que les ruines du lieu-dit «Les Plaines» de nombreux fragments se trouvent dans le haut du champ cultivé. Ces fragments sont assez brisés car les terres sont labourées régulièrement, je n’ai pas trouvé de grand morceaux.
Figure 82. Photo de l’auteur.
Ci-après une carte répertoriant, et localisant ces différents sites en rouge et les sources en bleu, les puits en mauve, existants à proximité à ma connaissance.
Figure 83. Carte IGN. Numérisation de l’auteur.

Il doit y avoir bien d’autres sites, notamment sur l’emplacement du village, il faudrait chercher dans les cours et les jardins des maisons.

Pour les amateurs qui veulent faire quelques découvertes, voici quelques conseils :
– Les constructions étaient de préférence sur une hauteur, car plus facile à défendre.
– Il faut se méfier « des trouvailles » dans les chemins qui ont été ravinés et sont très souvent comblés avec un remblai de vieilles constructions, qui restent malgré tout récentes. C’est souvent pareil aux bords des vignes qui ont été remblayées.
– La tuile gallo-romaine se différencie de la tuile moderne par sa structure, le grain est plus grossier, la composition hétérogène et la cassure moins nette et coupante. La couleur de la partie centrale est souvent différente de celle de l’extérieur qui est plus rouge, mais qui peut aussi être blanc crème. Cela dépend de la composition de l’argile, de la cuisson ou encore de l’âge. La surface est très souvent striée.
– Une dernière chose caractéristique est la forme, lorsque l’on trouve un fragment de tegula comprenant l’angle formé par le fond et le rebord, il n’y a pas de doute.

III. V – RESULTATS DES DERNIERES RECHERCHES ARCHEOLOGIQUES SUR LA COMMUNE
QUE L’ON M’A TRANSMIS (JUIN 2013)
Du 22 avril au 7 mai 2011 une fouille par sondage du site de La Bégude, sur la gauche de la départementale 166 allant à La Roques sur Cèze a livré du matériel paléolithique et les restes d’une tombe à incinération antique du II°–III° siècle de notre ère.

Ci-après un extrait du rapport de fouille établi par Guillaume Boccaccio directeur des fouilles. Je cite :

La tombe à incinération

Figure 83-1. Dégagement de l’unguentarium. Photo de l’équipe de fouille .
L’unguentarium (L’unguentarium est une fiole fusiforme, en verre ou céramique, destinée à conserver du parfum ou des huiles.)

(…)Le vase n’a subi qu’une seule fracture post-dépositionnelle ancienne à la base du col. Une petite esquille superficielle a par ailleurs été récoltée dans le tamisage des sédiments.
Cet état de conservation excellent permet de conclure que le vase n’a pas subi de passage au feu et qu’il s’agit donc d’un objet déposé en offrande, postérieurement à l’incinération, au moment de l’inhumation.
Cet unguentariumen verre naturel translucide est de couleur vert-bleuté. Le verre présente de nombreuses bulles et filandres (…)
Cet unguentarium-chandelier particulièrement élégant est de grande dimension avec une hauteur de 17,3 cm et un diamètre au niveau de la panse de 9 cm. Le rebord est très évasé et la lèvre est ourlée vers l’intérieur. La collerette ainsi formée mesure 4,2 cm de diamètre.

Figure 83-2. Unguentarium. Photo de l’équipe de fouille .
Anneaux et agrafes en bronze ou en fer

7 anneaux en bronze ont été retrouvés lors de la fouille. Les diamètres variables vont de 18 à 24 mm.

Plaques en bronze

2 plaques étaient placées entre les anneaux et agrafes en bronze. La première est une plaque très fine, d’environ 65 mm de longueur (incomplète) et 15 mm de largeur.
Elle comporte 2 perforations de 1 à 2 mm de diamètre qui résultent vraisemblablement de sa fixation par des clous.

Figure 83-3. Anneaux et plaque de bronze. Photo de l’équipe de fouille.
Figure 83-4. Amas d’ossements calciné. Photo de l’équipe de fouille.
Amas d’ossements calciné. La zone cendreuse apparaît nettement

Matériel paléolithique.

Industrie lithique des ramassages de surface.

1 : burin transversal;
2 : burin dièdre;
3 : grattoir-burin.

Figure 83-5. Silex taillés. Dessin de G. Boccaccio.
Industrie lithique du sondage 1.

1 : Nucléus à microlamelle sur front dorsal ;
2 : nucléus à microlamelle sur tranche longitudinale ;
3-4 : produits laminaires ;
5 : éclat laminaire retouché (paléolithique moyen ?)

Figure 83-6. Silex taillés. Dessin de G. Boccaccio.

Conclusion pour ce site.

Les recherches menées sur le site de la Bégude apportent des données inédites pour la vallée de la Cèze.
Concernant l’occupation antique, la fouille de la Bégude a permis la mise au jour(Involontaire) d’une incinération antique du IIe/IIIe siècle de notre ère. Le fait pourrait sembler anodin si cette incinération d’un homme adulte ne prenait probablement place dans un coffret en bois et bronze, et n’était accompagnée d’un très bel unguentarium en excellent état de conservation. Aucun site antique n’étant signalé dans la carte archéologique sur cette commune, la fouille apporte donc une information positive sur un secteur peu documenté.

Concernant l’occupation paléolithique, la fouille du site de la Bégude n’a pas apporté les réponses attendues quant à la précision de l’attribution chrono-culturelle. En effet, en l’absence de tout matériau organique, il n’a pas été possible de procéder à une datation radiométrique. Nous conserverons donc l’hypothèse d’une occupation attribuée au Magdalénien ancien sur les bases typo-technologiques précédemment avancées.
Par ailleurs, l’étroitesse de la surface fouillée n’a pas permis de rassembler de série lithique importante qui soit en mesure de conforter la série de surface. Cette étroitesse de la fenêtre de recherche résulte de la découverte et de la fouille de la fosse à incinération antique avant la découverte du niveau paléolithique en stratigraphie. Les recherches, limitées dans le temps, ont ainsi été largement freinées par la fouille minutieuse de cette tombe.

En revanche, la fouille de la Bégude apporte des données inédites pour le Paléolithique supérieur dans la vallée de la Cèze car il s’agit de la première occupation du Paléolithique supérieur fouillée dans cette vallée.
La fouille a permis de confirmer l’association dans le même horizon archéologique de productions micro-lamellaire d’une part et laminaire d’autre part.

Par ailleurs, le site prend place en bas de versant le long d’un affluent de la Cèze. Il se développe dans des colluvions argilo-sableux issus de formations loessiques locales et du substrat turonien. Sans pouvoir préciser si l’occupation est totalement en place, il faut noter que l’installation se situe à nouveau en contexte loessique (comme les sites de Cadenet à Gaujac, de Fontgrasse à Vers, de la Treille à Manduel, etc.). Or le mode même de sédimentation de ces formations favorise l’excellente conservation des structures et des aménagements de l’habitat. L‘existence de puissantes formations loessiques sur la rive droite du Rhône laisse ainsi présager d’autres découvertes de plein air.
Nous avons d’ores et déjà identifié plusieurs occupations inédites du Paléolithique supérieur : un second site probablement contemporain (magdalénien ancien ?) se place à moins de 300 m de la Bégude sur la commune de Sabran. Une présence gravettienne est attestée par une pointe de la gravette à Goudargues et un paléolithique supérieur indéterminé a été repéré sur la commune de Montclus.

Dans l’hypothèse d’un magdalénien ancien, la présence d’une occupation dans la vallée de la Cèze est importante. Vue la rareté des données concernant le magdalénien ancien en France et plus particulièrement en Languedoc, le site de la Bégude apporte un point majeur pour la compréhension globale de ce technocomplexe. Ce serait ainsi le gisement le plus oriental pour cette culture et le plus septentrional dans la vallée du Rhône. Si l’on considère le fait que le sillon rhodanien se place aux confins des sphères magdaléniennes et épigravettiennnes, la connaissance du site de la Bégude est donc capitale. La paléogéographie du paléolithique supérieur languedocien s’en trouve donc remodelée.

Concernant le prolongement possible de l’opération, au regard de l’intérêt technologique des pièces du sondage 1, mais aussi de la faible concentration de vestiges, il semble que la partie centrale du site soit proche. Nonobstant un probable léger remaniement de l’industrie, l’existence de zones non remaniées en dehors du secteur fouillé n’est pas exclue.
De fait, le potentiel autour du sondage 1 est réel : d’après nos estimations, il pourrait se situer dans un périmètre d’une vingtaine de mètres au nord, au sud et à l’est(…)

Fin de citation

SAINT MARCEL DE CAREIRET

Dans la publication Carte archéologique de la Gaule : Le Gard / Michel Provost 1999 signale qu’en 1981 au lieu-dit Rézoubert à St Marcel de Careiret A. Laville a découvert une tête de bélier en pierre sculptée dans le calcaire. En prospection sur le site on a trouvé les traces de deux occupations la première date de la fin du premier siècle après JC et de la première moitié du deuxième siècle après JC et la seconde date du V° siècle après JC. La tête de bélier est certainement à rattacher à la première période d’occupation et signale sans doute un lieu de culte. Actuellement au : Musée archéologique de Bagnols sur Cèze.

Photo de cinéraireFigure 84.

Au lieu-dit L’Abricote à St Marcel de Careiret, P. Michel a trouvé en 08/1970, dans son champ, une urne cinéraire en verre intact qui contenait des ossements. A proximité, J. P. Joly a vu, sur le sol des fragments de céramique commune. A 50 m à l’Est de l’incinération, des fragments de tegulae, d’imbrices (tuiles), d’amphores diverses et de sigilla (statuettes) atteste d’un petit établissement gallo-romain. Source et photo : JP JOLY Découvertes fortuites régions de Roquemaure et de Bagnols 1970. Rapports de découvertes, déposé au S.R.A. du Languedoc Roussillon à Montpellier.

Au lieu-dit Combe de Mons, S. Courret a fouillé une nécropole à inhumation du bas empire (aux environs du III° siècle) 6 tombes en bâtière, sans mobilier funéraire, mais avec des traces d’un foyer rituel à proximité d’une d’elles, ont été mises à jour. Source : revue Gallia 1975 p.526

Dans l’église, un grand cippe reliquaire porte l’épitaphe lue en 1902 par L.H. Labande : « Hic habit reliquias / sancte Mariae / et sancte Crosis / et sanctorum martyrium Marcelli / et Valériani qui passi / sunt in territuri/ um civitatis Cabiloninsis. » qui a été traduit comme suis : « Ici il y a des reliques de Ste Marie et de la Ste Croix et des St martyrs Marcel et Valérien, qui ont souffert leur passion sur le territoire de la cité de Chalon ».

La fin du VI° siècle, est suggérée par la nature des reliques rassemblées, le formulaire et le décor sculpté. Source LH Labande 1902 p.149

Il y a, à St Marcel, de nombreux sites archéologiques à répertorier mais ce n’est pas le but de ce site.

VERFEUIL

Dans le Bulletin historique et archéologique de Vaucluse et des départements limitrophes Joseph Sequin en 1885 signale « un Cippe funèbre (c’est un monument funéraire sous la forme d’un pilier bas qui signalait l’emplacement d’une tombe et portait une inscription funéraire), devenu le socle d’une croix, qu’une légende locale désigne comme le tombeau de la fille d’Hannibal, il y a dans la région plusieurs de ces monuments que les légendes populaires ont attribué au tombeau de la fille d’Hannibal notamment un à la Roque. Celui dont je parlais marque le bord de l’ancienne voie reconnaissable en plusieurs endroits de la forêt, et par-delà le vallon de Verfeuil, dans la gorge tourmentée qui mène à Saint- André d’Olérargues». Je cite, mais je n’ai pas localisé précisément le lieu.
Comme à St Marcel, il y aurait, à Verfeuil tout un travail de recherche à faire.

 

III. VI – CONCLUSION.

Quoique ne possédant pas de site remarquable, le territoire de la commune, sur le plan préhistorique et historique ancien, est malgré tout intéressant et n’a pas livré encore tous ses secrets. Aux générations futures de s’interroger.
Il peut y avoir aussi des sites préhistoriques sur l’emplacement des anciens hameaux dont la situation présentait des avantages certains.
Mais les vestiges sont moins faciles à trouver car couverts ou oblitérés par plus de deux mille ans d’agricultures et d’habitations plus récentes.